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Santé mentale des vétérinaires : ouvrir les yeux sur l’envers du métier (burn-out, dépression, suicide)

Être vétérinaire est un métier magnifique… et exigeant. Sous la passion et l’engagement, beaucoup vivent une charge émotionnelle, organisationnelle et financière qui entame la santé mentale des vétérinaires. Cet article n’a pas pour but de faire peur, mais de vous donner des repères factuels : comprendre les risques, c’est mieux s’y préparer. Avant de s’engager vers ce métier, il est important de prendre en compte les difficultés du métier.  


Les études alarmantes

Aux États-Unis (2023–2024)

Selon l’étude Merck Animal Health/AVMA 2024 (4 636 vétérinaires répondants), 82 % des vétérinaires présentent un niveau de burn-out allant de faible à élevé.

De plus, 10 % des vétérinaires présentent une détresse psychologique sévère. Chez les 18–34 ans, cette proportion atteint 17 %.

Les vétérinaires rapportent davantage d’idées suicidaires au cours de la vie que la population active générale (6,7 % vs 4,5 %), sans différence statistique sur les tentatives.

Les vétérinaires décédés par suicide sont 2,1 fois plus nombreux chez les hommes et 3,5 fois chez les femmes par rapport à la population générale (analyse CDC/JAVMA).

En France – premiers résultats nationaux

L’enquête du conseil national de l’ordre des vétérinaire & Vétos-Entraide (premier trimestre, 2022) rapporte que 4,7 % des vétérinaires interrogés ont déjà réalisé une tentative de suicide (à l’échelle de la vie). Les vétérinaires ayant tenté sont davantage exposés aux gardes fréquentes (nuit, week-end) et à une charge de travail plus lourde. Un suivi longitudinal (deuxième trimestre, 2024) confirme la chronicité du burn-out et des idéations suicidaires chez les personnes déjà touchées.

En 2021, selon Santé publique France, ~8 900 décès par suicide ont été recensés (taux standardisé 13/100 000), rappelant l’ampleur globale du sujet en santé publique.

Les chiffres France/États-Unis ne sont pas directement comparables car les outils de mesure et périodes sont différents. Mais ils tendent dans le même sens : risques élevés de burn-out, détresse psychologique et exposition au suicide au sein de la profession.


Pourquoi la profession est-elle si exposée ?

Ces travaux convergent sur un cocktail de facteurs :

  1. Charge de travail & horaires discontinus (urgences, gardes, astreintes) → dette de sommeil, conflits vie pro/vie perso. Les gardes (surtout week-end/nuit) sont liées à davantage de symptômes et parfois à plus d’idéations suicidaires.
  2. Émotions et éthique : annonces de diagnostics graves, fin de vie/euthanasie, souffrance ou détresse des propriétaires.
  3. Pressions économiques et organisationnelles (rentabilité, pénurie de personnel qualifié, interruptions continues au travail).
  4. Personnalité & perfectionnisme : l’étude américaine de 2024 souligne qu’un haut niveau de névrosisme prédit burn-out et détresse. La culture de la performance et le workaholisme accroissent les risques 15 mois plus tard.
  5. Jeunes diplômés & début de carrière : exposition rapide à la responsabilité clinique, endettement (surtout aux US), cyber-pression de clients, moindre marge de manœuvre.

Étudiants : comment vous préparer (vraiment)

Dès les études :

  • Apprenez des méthodes pour faire face (méthode de « coping » actives) : résolution de problèmes, hygiène de sommeil, techniques d’apaisement physiologique, sport régulier. Ces stratégies sont protectrices dans l’étude américaine de 2024.
  • Travaillez l’assertivité relationnelle : poser un cadre aux clients, savoir dire « je ne sais pas (encore) », gérer l’agressivité.
  • Construisez un réseau (tuteur en clinique, mentorat). Les équipes qui discutent ouvertement de bien-être réduisent la stigmatisation et orientent plus tôt vers l’aide.

À l’entrée dans le métier :

  • Négociez la réalité du poste, pas seulement le salaire : nombre de consultations/jour, organisation des urgences, temps dédié aux appels/compte-rendus, back-up clinique. Le nombre de consultations est un des meilleurs prédicteurs négatifs 15 mois plus tard.
  • Cadrez la charge horaire : roulements, récupérations, limites de joignabilité.
  • Équipe & culture : privilégiez les structures qui parlent de santé mentale, ont un programme d’aide aux employés et des procédures d’incident (clients agressifs, erreurs, euthanasie). Ces facteurs sont associés à moins de burn-out.
  • Finance perso : un conseil financier est associé à moins de détresse sévère dans l’étude américaine 2024 (corrélations).

Signaux d’alerte à ne pas ignorer

  • Épuisement persistant : fatigue écrasante, cynisme, distanciation.
  • Troubles du sommeil (difficultés d’endormissement/réveil trop tôt) et somatisations (douleurs, troubles digestifs) qui s’installent.
  • Pensées de mort / idées suicidaires (même « passagères ») — à prendre au sérieux sans attendre.

Ce qu’on sait des trajectoires : lorsque burn-out, idéations et troubles du sommeil sont présents à un temps T, ils ont tendance à persister 15 mois plus tard si rien n’est fait. D’où l’importance d’une intervention précoce. Il est important de ne pas rester seul et de parler des difficultés rencontrées.


Où trouver de l’aide (France)

  • 3114 – Numéro national de prévention du suicide, 24/7, gratuit.
  • SOS Amitié : 09 72 39 40 50 – écoute anonyme.
  • Médecin traitant / CMP (centre médico-psychologique) de votre secteur.
  • Vétos-Entraide (association professionnelle) et dispositifs de vos écoles/cliniques (cellule d’écoute, tutorat).

Si vous pensez au suicide ou vous vous inquiétez pour quelqu’un, appelez le 3114 ou les secours d’urgence (112). Demander de l’aide est un acte professionnel et responsable.


À retenir

  • Le burn-out est fréquent dans la profession ; les jeunes et ceux en animaux de compagnie sont souvent plus exposés.
  • La détresse sévère concerne ~10 % des vétérinaires américains (17 % des 18–34 ans). En France, une enquête nationale indique 4,7 % de tentatives de suicide déclarées à l’échelle de la vie.
  • La prévention fonctionne : équilibre de vie, culture d’équipe saine, coping actif, limitation de la charge (consultations, astreintes), et accompagnement financier sont associés à moins de burn-out et de détresse.

Sources principales

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